Les cartes de bruit ont du sens
Voici l’article numéro 7 sur 17 qui a été publié dans le magazine « Actu Environnement«
Chaque lundi, vous retrouverez un nouveau numéro qui sera diffusé sur le site.
Ces articles vous permettront de comprendre le travail des acousticiens.
Bien évidemment les membres de CINOV GIAC de notre région Languedoc Roussillon sont à votre disposition pour vous donner les solutions sur le terrain.
[button color= »orange2″ link= »https://www.cinov-occitanie.fr/wp-content/uploads/2017/08/Liste-membres-CINOV-GIAC-lr.pdf » size= »big » align= »center » target= »_blank »]Liste des membres[/button]
[box]
Si vous le souhaitez vous pouvez lire ou relire l’article numéro 6
[button color= »bleu » link= »https://www.cinov-occitanie.fr/vibrations-en-ville-2017-10-16″ size= »big » align= »center » target= »_blank »]ARTICLE N°6[/button][/box]
Toutes les cartes ont un sens, au moins géographique. Ce n’est pas un hasard si l’Union européenne a décidé de faire établir des cartes de bruit dans ses Etats membres en vue de la mise en place d’actions de prévention et de réduction du bruit. Depuis plus de dix ans (suite à la parution de la directive européenne 2002/49/CE), gestionnaires d’infrastructures de transports et agglomérations de plus de 100.000 habitants réalisent des cartes de bruit stratégiques (CBS) et mettent en place des plans de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE).
Les cartes de bruit sont établies à l’aide de la modélisation numérique acoustique des territoires, elles présentent ainsi des résultats théoriques. Leur précision dépend essentiellement de celle des données d’entrée des modèles et de leur exhaustivité : géométries, trafics, populations, etc. Pour cela, les modèles sont généralement validés à l’aide de campagnes de mesures acoustiques in situ, permettant de coller à la réalité (rien à voir avec la mesure que vous pouvez faire sur votre smartphone, démarche plutôt inverse qui permettrait de situer votre ambiance sonore par rapport à des quantités usuelles, voire cartographiées).
Cela dit, du fait de l’évolution constante des territoires et de leur fréquentation, ces cartes ne sont plus à jour, au jour de leur publication… Mais même si elles ne sont pas parfaites, ni toujours homogènes entre elles, elles représentent un bon diagnostic initial pour la détection de zones sensibles, en vue de leur protection contre le bruit ou bien pour la création de zones dites « de calme ». Et leur révision est prévue tous les cinq ans, ce qui permet une amélioration constante des représentations ainsi que celle des PPBE qui leur font logiquement suite. Ce premier diagnostic mérite ainsi souvent d’être approfondi par les collectivités qui souhaitent répondre au mieux aux préoccupations de leurs administrés.
Au-delà des cartes : croisements d’informations
La finalité des acousticiens consiste à caractériser le bruit, pas seulement en tant que grandeur physique, mais surtout en tant que gêne potentielle dans l’environnement. Afin de faciliter ce travail, nous utilisons les systèmes d’information géographique (SIG) ; les données géoréférencées permettent en outre la mutualisation et le partage de différentes données d’entrée – qui sont acoustiques, géométriques, administratives – ainsi que de différentes données de sortie exprimées sous forme de graphiques ou de cartes, parfois issues de tableaux et de requêtes. Et les SIG permettent notamment de croiser des informations, telles que des données de populations avec l’exposition au bruit.
Un écart peut parfois être constaté entre niveaux sonores calculés et gêne des riverains par rapport à des nuisances sonores ; car la sensibilité des personnes n’est pas uniquement auditive, elle peut être liée à de nombreux facteurs psychologiques, sociologiques, cognitifs, à d’autres facteurs de nuisances, etc. Des investigations complémentaires, par exemple par des mesures acoustiques qualitatives et des enquêtes perceptives auprès des riverains, permettent généralement d’expliquer l’origine d’une gêne. C’est ainsi que d’autres informations sur les nuisances peuvent être croisées entre elles, très nombreuses, les deux exemples qui suivent en illustrent des cas-types.
Les cartes de bruit stratégiques utilisent des indicateurs de niveaux sonores qui ne représentent qu’une information limitée sur la nature et l’ampleur des bruits estimés (indicateurs de moyennes) ; il existe de nombreux indicateurs en acoustique qui peuvent exprimer le caractère temporel d’un signal ou encore sa nature spectrale. En matière d’amplitude, ce ne sont pas nécessairement les valeurs absolues qui expriment la gêne, c’est aussi par exemple l’émergence du bruit incriminé par rapport au bruit ambiant résiduel ; ce critère d’émergence est d’ailleurs pris en compte dans la réglementation française relative aux bruits de voisinage ou encore vis-àvis des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE).
En croisant cartes de bruit et cartes de polluants de l’air (NO2 et PM10 par exemple), on constatera souvent que toutes deux possèdent des empreintes similaires, du fait de la prédominance des émissions liées aux transports routiers. Des solutions communes pour la réduction de l’ensemble des nuisances émises doivent alors être recherchées.
Des actions élargies : thématiques et territoires
Les actions doivent souvent impliquer des choix stratégiques à des échelles administratives et géographiques bien plus larges que celles dont les collectivités impliquées ont la charge. Si les cartes apportent un support de communication de base, pour les décideurs et le public, elles méritent d’être approfondies en détail sur les thèmes les plus sensibles du territoire, ceci afin d’élaborer des plans d’actions qui soient le mieux adaptés aux besoins de la population.
L’obligation pour les collectivités de réaliser des cartes de bruit stratégiques (CBS) et des plans de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE) doit devenir dans bons nombres de cas, non pas une contrainte, mais une opportunité. La qualité de l’environnement sonore est en effet un élément important dans l’appréciation du cadre de vie, elle est devenue un atout pour l’attractivité d’un territoire. Signalons que l’avancement des réalisations des cartes et PPBE en France est répertorié par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), notamment sur internet via l’application Cartelie. A l’échelle européenne, l’Agence européenne pour l’environnement met à disposition les cartes sur le lien https://noise.eionet.europa.eu/.
Bertrand Masson, Impédance Ingénierie